L'union africaine et le panafricanisme d’aujourd’hui

L'union africaine et le panafricanisme d’aujourd’hui

Conférence donnée à la Bibliothèque Africaine de l’Université de Meiji

Tokyo (Japon) le 1er mai 2008

Je voudrais, à l’entame de mes propos, exprimer mes vifs sentiments de gratitude à l’endroit du Prof. FUKUDA pour le privilège et l’amitié qu’il vient de me renouveler, en m’invitant la seconde fois en 8 ans, échanger avec des illustres amis de l’Afrique de la Bibliothèque africaine de l’Université de Meiji autour des multiples problèmes qui interpellent notre jeune continent. Les sujets que l’occasion m’a été donnée de traiter à savoir « la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples » dont venait de se doter l’OUA et présentement « l’Union africaine et le panafricanisme d’aujourd’hui » traduisent l’intérêt que les Africanistes du Soleil Levant portent aux interrogations de l’heure en l’Afrique.

 

Le panafricanisme, ce vieux concept, a refait surface dans le débat politique d’abord à l’Union africaine, puis fut ensuite relayé dans les espaces nationaux suite à la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine réunie à Accra (Ghana) en juillet 2008. Le choix du Ghana fut un symbole fort non pas parce que le Président KUFFOR était en ce moment le président en exercice de l’Union africaine mais parce que le Ghana à travers la personne de son premier président Kwame NKRUMAH de 1957 à 1966, l’OSAGYEFO –le Rédempteur- était le symbole du panafricanisme qui, plus qu’un mythe, était considéré comme une voie incontournable de développement et d’affirmation de leur souveraineté et de leur identité par les jeunes Etats africains, jadis colonisés par l’occident, et qui venaient tout juste d’accéder à la souveraineté internationale.

 

Le panafricanisme, à ses origines, n’intégrait pas dans sa démarche l’intégration des Etats africains qui, à l’exception de l’Ethiopie et du Libéria, n’existaient pas encore. Il a précédé dans le temps l’Afrique considérée comme un continent d’Etats souverains. Il s’agissait à ses origines d’un mouvement d’affirmation d’une identité culturelle unissant les peuples africains du continent et de la diaspora noire dans un seul ensemble visant à régénérer et unifier l'Afrique ainsi qu'à encourager un sentiment de solidarité entre les populations du monde africain et les diasporas noires d’Amérique. Le panafricanisme glorifie le passé de l'Afrique et inculque la fierté à ses peuples par la reconquête des valeurs africaines.

 

La paternité de ce mouvement culturel est attribuée à Edward Wilmot Blyden (1832-1912) mais les intellectuels noirs jamaïcain et américain Marcus Garvey et W.E.B Du Bois, l’ont porté au summum de sa gloire. L’intelligentsia africaine naissante va se l’approprier en lui donnant positivement une essence plus radicale au double plan culturel et politique. Sur le replan culturel tandis que Kwame NKRUMAH va en fait un slogan de libération, d’intégration et d’unification des peuples africains libérés du joug colonial.

 

Sur le même plan existe une vision relativement radicale du panafricanisme fondée essentiellement sur les travaux du chercheur sénégalais, Cheikh Anta Diop, et qui propose le réexamen « afrocentriste » de l'histoire de l'Afrique et de sa diaspora en vue de contrer l’impérialisme de l’approche européocentriste qui dominait jusqu’alors les écrits, recherches et réflexions sur la non historicité des civilisations africaines. Ce courant met l’accent sur un retour à des concepts dits traditionnellement africains et à la "culture africaine" affirmant l’essence nègre de la civilisation égyptienne qui serait antérieure à toute autre civilisation, fusse-t-elle la civilisation grecque qui tirerait ses véritables origines de l’Afrique. La prise en charge politique du panafricanisme fut l’œuvre du Président Kwame NKRUMAH, père de l’Indépendance du Ghana, pour qui l’idéologie d’une conscience politique parmi les Africains, ainsi que leur émancipation, devraient se répandre partout dans le continent. La finalité du combat de NKRUMAH fut dédiée à la construction de l’Unité africaine qu’il imagine comme une fusion organique des Etats Indépendants et non comme une simple coopération. Dans sa conception du « consciencisme » inspiré d’un marxisme revisité, non orthodoxe, doit être associé au concept traditionnel africain de collectivisme qui vise « la résurrection des valeurs humanitaires et égalitaires de l’Afrique traditionnelle dans un environnement moderne. C’est dans ces conditions idéologiques et politiques que le panafricanisme apparut au lendemain des indépendances africaines comme un terme fédérateur censé mobiliser toutes les énergies positives des peuples africains et de la diaspora en vue de réaliser l’unité tant rêvée et idéalisée de l’Afrique, même dans les constitutions des Etats qui prévoient pratiquement toutes des dispositions faisant peser sur les gouvernants nationaux une obligation de ne ménager aucun effort pour la réalisation de l’Unité africaine.

 

L’OUA, portée sur les fonts baptismaux en 1963, délaissera vite les idées trop radicales de l’un de ses pères-fondateurs, Nkrumah , considéré comme trop radical et dont les sympathies à l’égard du communisme étaient un peu trop affichées dans un contexte de guerre froide et de positionnement idéologique des puissances marxistes-léninistes et libérales.

 

Le rêve de Nkrumah traduit par son fameux cri de cœur « Africa Must Unite ! » se heurte aussi à des résistances internes. En effet, dès le départ le panafricanisme se heurta à un courant qualifié de « minimaliste » et gradualiste incarné par le Président Félix Houphouët BOIGNY et ceci au nom de la souveraineté des Etats, d’autant que la charte constitutive de l’OUA avait fait du respect des frontières héritées du colonialisme un principe sacro-saint dans le processus de construction de l’Unité africaine. Même les chefs d’Etat hostiles à la balkanisation du continent africain imposée par la conférence de Berlin (1884-1885) concevaient d’une autre manière la mise en œuvre du panafricanisme. Les pragmatiques, notamment le Président Léopold Sédar Senghor, théoricien de « l’unité par « cercles concentriques », partant des ensembles régionaux pour déboucher plus tard sur l’unité de l’Afrique, voyaient en Nkrumah un doctrinaire égocentrique et ambitieux cachant en réalité des plans expansionnistes visant, en cette période de guerre froide, à livrer toute l’Afrique, poings et mains liés, au communisme.

 

Nkrumah fut désavoué sur la scène africaine et internationale et diabolisé par les adversaires du panafricanisme. Il fut victime d’un coup d’Etat militaire en 1966 et mourut en exil en 1972. Le panafricanisme fut ainsi rangé dans les tiroirs des idéaux irréalisables en Afrique.

 

Rangé aux oubliettes pendant plus 4 décennies, le panafricanisme refait surface en 2002 avec la création de l’Union africaine dans le prolongement des efforts entrepris par l'Organisation de l'unité africaine (OUA) pour intégrer les pays africains et unifier le continent sur les plans politique, économique et social.

 

L’instauration de l’Union africaine est considérée, par de nombreux hommes politiques et par les chefs d’Etat africains, comme un événement majeur dans l’évolution institutionnelle du continent. La mise en place de cette nouvelle organisation répond à un besoin de réajustement et de modernisation des structures de l’OUA, qui visiblement n’étaient plus adaptées au processus d’intégration du continent dans l’économie mondiale, et dans le règlement des problèmes sociaux, culturels, économiques et politiques. C’est pourquoi une transition plus ou moins longue fut mise en œuvre choisie pour effectuer un passage de l’OUA à l’UA. Une session extraordinaire de la conférence des chefs d’État en septembre 1999 à Syrte en Libye avait abouti une déclaration adoptant le principe de la création de l’union africaine. Un an plus tard à Lomé, l’acte constitutif de l’Union fut adopté. En 2001, le sommet de Lusaka valide le programme de mise en place de l’Union africaine. Puis, en 2002 le sommet de Durban lance effectivement l’Union africaine par une conférence inaugurale des chefs d’État et de gouvernement de l’Union. Depuis sa création, l’UA a entrepris un vaste chantier dans le domaine de l’intégration politique avec l’adoption de déclarations et chartes dans le domaine de la démocratisation, de l’Etat de droit, des élections et de la bonne gouvernance. Des institutions d’intégration ont été progressivement mises en place telles que le NAPAD, le MAEP et surtout le parlement panafricain créé depuis 2004 et abrité par l’Afrique du Sud et qui, en l’état actuel de son évolution est un organisme consultatif en attendant d’être plus tard transformé en instance délibérative.

 

Aussi, l’Afrique retrouve-t-elle une vieille connaissance, à savoir le panafricanisme. Mais ce panafricanisme de type nouveau présentement certainement un visage plus réaliste et moins idéologique dans un environnement marqué par une polarisation des relations internationales dans un contexte de mondialisation et de globalisation. Toutefois, en dépit de la volonté affichée par les gouvernants de réaliser l’intégration politique et économique de l’Afrique force est de reconnaître que le projet panafricaniste rencontre toujours des écueils, voire des vives résistances ou défiances qui continuent à renvoyer aux calendes grecques le projet de création des Etats-Unis d’Afrique.

 

I. LA PRISE EN CHARGE DU PANAFRICANISME PAR L’UNION AFRICAINE

 

Le projet panafricain d’aujourd’hui a refait surface à partir d’une proposition visant à créer un certain nombre de portefeuilles ministériels de l’UA faite lors de la 4ème session ordinaire de la Conférence des chefs d’Etats et de gouvernement de l’Union Africaine réunie à Abuja (Nigeria) en janvier 2005. La Conférence accepta la pertinence de la proposition conforme au demeurant avec la vision de l’UA et prit la décision de mettre en place un comité de 7 chefs d’Etat sous la présidence de Yoweri Museveni (Uganda) pour examiner la proposition dans toutes ses ramifications.

 

Dans un rapport soumis à la 5ème session ordinaire de la conférence tenue à Syrte (Libye) en juillet 2005, le comité exprima la vision que la proposition aille au delà de la simple création de portefeuilles ministériels dans certains domaines d’activités de l’UA. Il alla plus loin en recommandant une action en direction de la formation d’un gouvernement de l’union pour tout le continent.

 

Après réexamen du rapport, la conférence réaffirma que le but ultime de l’UA est une pleine intégration politique et économique devant mener aux Etats-Unis d’Afrique.

 

En conséquence, un autre comité de chefs d’Etat et de gouvernement fut mis sur pied sous la direction du Président en exercice de la Conférence de l’union, président Olesegun Obansanjo du Nigéria avec pour mandat d’examiner toutes les idées déjà exprimées sur le sujet ainsi que les autres propositions pouvant être exprimées à travers les consultations. Le mandat incluant aussi des étapes pour la réalisation de l’objectif.

 

Sur invitation du président du comité, une conférence fut organisée à Abuja en novembre 2005 sur le thème « Désirabilité du gouvernement de l’Union en Afrique » avec des participants venant d’horizons divers incluant les membres du comité des 7, des universitaires, des experts, des représentants de la diaspora africaine, des organisations de la société civile aussi bien que les exécutifs des organisations économiques régionales et les médiats. La conférence conclut entre autres dans ses résolutions et recommandations:

 

- De la nécessité d’un gouvernement de l’ »union ne fait aucun doute ;

- Que concernant l’Union, il doit s’agir d’une union des peuples africains et non simplement d’une union d’Etats et de gouvernement.

 

Sur la base des conclusions de cette conférence, le comité recommanda l’élaboration d’un document de travail définissant les objectifs du gouvernement de l’union, sa nature, ses principes fondamentaux, les étapes et le processus en même temps qu’un plan de route indicatif pour sa mise en œuvre. La conférence mandata la commission de l’UA de rédiger un document consolidé a soumettre à la 7ème session ordinaire à Banjul en juillet 2006.

 

Une « Etude sur le gouvernement de l’Union Africaine vers les Etats-Unis d’Afrique » fut élaborée et présentée à la 7ème session ordinaire à Banjul en juillet 2006 par le président Olesegun Obansanjo du Nigéria, président du comité des 7. La conférence réaffirma que le but ultime de l’UA est la pleine intégration politique et économique devant mener aux Etats-Unis d’Afrique et demanda à la commission de convoquer une session extraordinaire du conseil exécutif , un des organes de l’Union Africaine, pour examiner le rapport et proposer une structure d’action appropriée.

 

L’étude fut examinée par le Conseil exécutif lors de sa 9ème session extraordinaire tenue du 17 au 18 novembre 2006 à Addis Abeba. La principale conclusion était que tous les Etats membres acceptent les « Etats-Unis d’Afrique » comme un objectif commun et désirable mais des différences existent sur les modalités et le timing pour la réalisation de l’objectif commun.

 

Le rapport du comité exécutif fut soumis à la 8ème session ordinaire de la Conférence des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union africaine réunie à Addis Abeba du 29 au 30 janvier 2007. Etant donné la nature des propositions contenues dans l’étude et leurs implications au niveau national, continental et international, la Conférence décida que la prochaine session ordinaire de la Conférence prévue à Accra, Ghana en juillet 2007 sera consacrée à un « Grand débat sur le Gouvernement de l’Union ».

 

Dans cette même perspective, la Commission de l’union Africaine organisa une retraite des MAE à Durban, AS, du 8 au 9 mai 2007 pour une imprégnation sur l’état de l’Union qui aura les mêmes effets que le grand débat.

 

L’objectif de ces deux rencontres était d’entreprendre de profondes discussions sur la nature du programme de l’intégration continentale en vue de déterminer aux yeux de ses initiateurs « où nous sommes, où nous allons et comment y aller ».

 

La session ordinaire des chefs d'Etat et de gouvernement des pays membres de l'Union africaine, réunie du 1er au 3 juillet 2008 à Accra (Ghana) fut consacrée à la création d'un gouvernement fédéral africain en présence d’une trentaine de chefs d'Etat du continent. Mais le panafricanisme doit-il apparaître comme un rocher de Sisyphe car les chefs d'Etat et de gouvernement des 53 pays membres de l'Union africaine (Ua) ont une fois de plus révélé aux observateurs et à l’opinion publique africaine et internationale leurs profondes divergences sur la création d'un gouvernement de l'Union et la mise en œuvre du processus de constitution des Etats-Unis d'Afrique, renvoyant encore une fois les modalités de réalisation du rêve du panafricanisme aux calendes grecques.

 

II. LA PERSISTANCE DES ÉCUEILS

 

Les chefs d’Etats et de gouvernement africains ont de nouveau débattu de la question du panafricanisme dans sa dimension politique dans la ville même d’Accra là où, 44 ans auparavant, le président Nkrumah avait appelé à l’unité du continent. La controverse aux lendemains des indépendances nationales entre les tenants de la souveraineté des Etats et les adeptes de l’unité africaine est toujours de mise même si les termes de cette controverse sont différemment exposés avec l’opposition des radicaux face aux modérés. La passion des débats a semble-t-il occulté un véritable problème de terminologie. Faut-il parler d’un projet d’un « gouvernement continental », de la création des «Etats-Unis d’Afrique » ou de l’instauration d’un « gouvernement de l’Union africaine“. Les Etats-Unis d’Afrique créés selon le modèle des Etats-Unis d’Amérique se traduiront-ils par une fusion organique des Etats africains et la mise en place d’un Etat fédéral appelé à se superposer aux Etats actuels. Le gouvernement continental n’exclut pas l’existence des Etats souverains dotés de gouvernements nationaux car s’inspiré d’un système d’organisation confédéral, se rapproche du gouvernement de l’union africaine tout en s’en différenciant car le gouvernement est une structure propre de l’organisation continentale.

 

Si les chefs d’Etat et de gouvernement sont dans l’ensemble d'accord sur les Etats-Unis d'Afrique et le gouvernement continental, certains cependant posent des préalables. Car, si certains pays veulent y aller immédiatement jusqu’ici d’autres estiment qu'il faut y aller progressivement. Le recul du temps ainsi que les expériences vécues engrangées n’ont pas suffit à dégager à un consensus immédiat sur l’expression du panafricanisme d’aujourd’hui sujet tant les positions des uns et des autres semblent éloignées.

 

A. LES RADICAUX

 

La position tranchée et sans équivoque en faveur de la création immédiate des Etats-Unis d’Afrique est celle défendue par Kadhafi de la Lybie, qui, selon certains observateurs, se verrait bien un jour "président de l'Afrique", Abdoulaye Wade du Sénégal et Bongo du Gabon.

 

Les motivations stratégiques diffèrent mais le résultat est le même. Pour Me Wade qui s'adressait à la presse à la fin d'une séance à huis clos consacré à la création du gouvernement de l'Union africaine, il n'y a ''pas de salut pour l'Afrique en dehors de son unité politique'', et il ajoute que ''la rationalité économique nous impose à avoir un seul marché''. Il a qualifié de fallacieux l’argument selon lequel il faut une intégration économique avant de mettre en place le gouvernement de l’Union africaine parce que l’intégration politique peut aider l'intégration économique''. Abdoulaye Wade est plus loin en déclarant « pas de reculade pour la démarche, il faut avancer. Pas de concession à ceux qui défendent des thèses rétrogrades. Et Il faut mener la lutte sans répit et les pousser à abdiquer ». Il n’exclut pas, dans ce cadre, la possibilité pour un certain nombre d'Etats d'aller ensemble'' a conclu le président sénégalais en réponse à la question de savoir quelle serait l'attitude de son pays si cinq Etats décidaient de mettre en p/stronglace ce gouvernement.

 

Le ministre des Affaires étrangères sénégalais Sheikh Tidiane Gadio a indiqué de son coté que son pays soutenait la création immédiate de ce gouvernement, tout en s'interrogeant : "Les Africains sont prêts » mais la véritable question est de savoir « si ceux qui les gouvernent sont prêts à rejoindre leurs aspirations ».

 

Le Gabon dont le ministre des Affaires étrangères LI PENG a été élu président de la Commission de l’Union Africaine a plaidé, à l’instar du Sénégal, pour la création rapide d'un gouvernement de l'Union africaine. "Aujourd'hui, notre continent doit s'engager sur une accélération de son processus d'intégration. Il est clair que le temps de la création d'un gouvernement de l'Union (africaine) est venu", a ainsi déclaré le président gabonais Ondimba Omar Bongo.

 

B. LES MODÉRÉS

 

Face aux radicaux, de nombreux pays estiment qu'il est trop tôt et qu'il y a trop de disparités entre les Etats membres pour réussir une intégration totale. L'Afrique du Sud, les Etats membres de la Sadc (Communauté de développement de l'Afrique australe) et le Nigeria prônent en effet une intégration graduelle par étapes et un renforcement d’abord des communautés sous-régionales.

 

La volonté d'élever l'intégration régionale au rang de modèle stratégique de transformation et de modernisation de l'économie africaine devrait permettre d’impulser ou de redynamiser le rôle des États qui doit être réévalué dès lors qu'est admis le rôle central joué par l'Etat dans les succès économiques enregistrés dans certains pays d'Asie. Cette reconnaissance remet en cause les orientations ultra-libérales qui avaient prévalu durant les quinze dernières années concernant le développement socio-économique des pays africains.

 

"Notre point de vue est motivé par le besoin impératif, à ce stade du processus de développement du continent, que les nations africaines se concentrent plus sur le renforcement et la consolidation de la (bonne) gouvernance, des structures de développement et sur une intégration régionale plus robuste", a ainsi estimé le président nigérian Yar'Adua.

 

Le Premier ministre du Lesotho Pakalitha MOSISILI, de son coté, a exposé les appréhensions de la Sadc. "Certes, les intérêts de l'Afrique seraient mieux défendus par la voie d'une intégration politique et économique. Mais nous pensons qu'une telle intégration devrait être progressive et non précipitée", a-t-il affirmé.

 

CONCLUSION

 

Certes des progrès incontestables ont été réalisés depuis les pères fondateurs de l’Oua dans la voie du panafricanisme, mais force est de reconnaître que les réalisations sont en deçà des attentes des peuples africains qui sont interpellés par les grands défis qui sont adressés au continent, en particulier la stabilisation politique et économique dans le contexte de la mondialisation et de la globalisation. Ce débat sur le panafricanisme d’aujourd’hui ne saurait être réservé aux seuls chefs d’Etat et de gouvernement. Il interpelle les peuples africains qui doivent être associés au processus décisionnel dans leurs Etats, leurs organisations régionales économiques et l’organisation continentale pour conférer une plus grande légitimité et effectivité des politiques publiques. Le réalisme devrait, de nos jours, sous-tendre ces actions. L’Afrique n’est pas une. Elle peut être appréhendée différemment selon le niveau de développement politique et économique des Etats, selon les climats et les aires civilisationnelles. Occulter ses disparités reviendrait à une unité de façade. Toutefois, il convient de bien mener le combat au sein de l’Union africaine qui depuis sa mise en place s’est investie dans la mise en place d’un environnement économique et politique propice au développement des peuples et à la réduction des inégalités qui constituent des goulots d’étranglement au panafricanisme.

 

Je vous remercie de votre aimable attention.

 

El Hadj MBODJ

Agrégé de droit public et de science politique

Université Cheikh Anta Diop de Dakar (SENEGAL)

 

Membre des éminents juristes chargés de la réécriture de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance 

“GLOBAL NINE CONFERENCE TO ABOLISH WAR INTERNATIONAL SYMPOSIUM”

OSAKA (JAPON) May 6th 2008

WORLD’S POVERTY, CONFLICT AND ENVIRONMENT AND ARTICLE 9 

Prof. El Hadj MBODJ’s Keynote address

 

I would like to extend my sincere thanks and express my deepest gratitude to “Peace Boat” for inviting me to the "Global Article Nine Conference to Abolish War" International Symposium. This meeting is very important for me, as it give me the opportunity to interact and to share with the eminent participants experiences and hopes for the preservation of what is rightly regarded as the main export product of Japanese constitutional law: Article 9 of the Constitution of 1947.

 

This provision, the only one that exists in all constitutions of liberal democracies and which inspired that of Costa Rica, is currently threatened by opponents of pacifism with initiatives for its revision. Friends of Article 9 have then other recourse than to pursue the fight for the protection of lofty ideals rooted in the Japanese constitution. Thus, it not the only fight of Japanese pacifists only since maintaining Article 9 must be the main goal of all activists of peace and justice all around the world.

 

In this regard, I am honored, as a former director of the Institute of Human Rights and Peace at the University Cheikh Anta Diop in Dakar - Senegal-to disseminate the values of peace and international solidarity rooted in article 9 of the Japanese Constitution, in the civil society at local, national, regional and continental levels, especially as the African Union is preparing for November 2008 a Continental Conference on African Constitutions.

 

Allow us to stress that the African continent, to our knowledge, has not been fully involved in the dynamics of "Global Article 9 Conference to Abolish War". Back to home after the Symposium of Tokyo and Osaka, I pledge myself to serve this cause by informing and educating our political and civil society, with individual initiative that I intend to bring in the academic area for a greater emphasis on educating the culture of peace based primarily on Article 9 of the Japanese Constitution.

 

This commitment for the dissemination and preservation of the ideals of peace could not be cyclical. Our continent – Africa - aspires to peace and stability in order to promote its development. As you know, without doubt, Africa is the poorest continent on the planet. According to the Human Development Index (HDI) of UNDP 33 states on the 50 poorest countries in the world are in sub-Saharan Africa. Malnutrition, poverty, illiteracy and disastrous health situation with the prevalence of major pandemics such as HIV / AIDS, malaria, cholera, are the daily drama of African populations. The humanitarian situation is made worse by the proliferation of armed conflicts that undermined its environment and development.

 

“The world's poverty, conflict and environmental and Article 9” is the topic that I have been asked to address in this panel. Its scope is widespread. Moreover, I cannot go over the time given to me to make diagnoses and offer or therapies. Indeed, I do not have any miracle cures to the illness afflicting the African continent. However, I propose findings to justify the relevance of a constitutional pacifist mechanism like Article 9 of the Japanese constitution in the constitutions of the African states.

 

I. INSTABILITY IN THE AFRICAN STATE

 

Instability characterizes the post-colonial African states. The national independence did not respond to the hopes of African peoples. African states did not come over undevelopment because of the recurrence of armed conflicts and civil wars that are their daily living.

 

Independence has not brought stability and peace to former European colonies. On the contrary, the new states are very quickly become preferred areas of confrontation between the major military powers that fed wars between states or conflicts within States.

 

Before the turn of the years 1990, conventional wars between states generally reflected the East-West, communism and liberalism opposition.

 

Since the beginning the 1990 th, conflicts became more internal, as they often oppose people in rebellion against the central authority of their respective countries, even if they are supported, in some cases, by foreign countries or organizations of all sorts.

 

These conflicts, occurred during the past 40 years, have had disastrous consequences on human development in the continent. According to a 2004 Report of the African Union Commission, no fewer than 26 conflicts erupted in Africa between 1963 and 1965 affecting the lives of 474 million and leaving more than 7 million deaths. Civil wars have killed more people in Africa during the past two decades than anywhere else on earth. According to a Report of International Rescue Committee published in 2003, 3.3 million people died as a result of the conflict in the DRC, the Rwandan genocide of 1994 has claimed more than 800000 dead and civil war in Burundi in 1993 at least 250000 dead. Africa has the largest number of refugees (3.5 million) and people displaced inside their own country (13 million).

 

The causes of these conflicts are multiple and the responsibilities shared.

 

The colonial legacy is largely responsible for the situation currently faced by African states. These states have been artificially created from the former western colonies, which at the Berlin Conference of 1884-1885, had traced the borders arbitrarily without taking into account the ethnic configuration of territorial spaces. Thus, people who did not know each other or who were in open or latent conflicts were forced to live together.

 

The causes are also economic. The African continent has raw materials in quantity and quality. However, it has no control over its natural resources whose prices are set by the international market on which the producing countries cannot act effectively.

 

In this continent victim of its wealth and paradoxically very poor, access to land and water is very difficult to manage. It is also difficult to organize a sustainable way for peace and reconciliation between ethnic or regional groups. In Zimbabwe in southern Africa, as in Rwanda in the centre until the forest regions of Côte d'Ivoire and Sierra Leone, land insecurity and precarious access to land and rangelands, are nowadays among other things, the main sources of conflict.

 

The mineral wealth often fuel conflict and make Africa an attractive market for both sellers of weapons and traffickers who are competing for this lucrative trade that huge financial burden on low budgets States. Indeed, if high-income countries – such as the industrialized world or the rich countries of the Middle East - have the highest per capita military expenditures, developing countries, especially those with low income and means of Africa and the Middle East, bear the heaviest burden in this area as a percentage of their GNP.

 

The transfers and arms trafficking remain a major problem of global security in Sub-Saharan Africa. The influx of small arms, often financed by diamonds and other raw materials like oil or wood, consolidates the persistence of these conflicts. The Africa attracts countries and producers who want to get rid of surplus Cold War arms or overtaken by technological advances.

 

These crises have encouraged the proliferation of small arms, the recruitment of child soldiers and maintained in urban violence in several African capitals.

 

We could not review all the problems related to poverty, crises and environment of African States. The presentation of this dark picture of Africa aims to highlight the urgent need for African states to have a legal framework similar to Article 9 in order to cultivate a climate of peace and stability conducive to their development.

 

II. PEACE CONSTITUTION FOR AFRICAN STATES

 

Article 9 of the constitution of peace has been regarded as a very nice export provision of Japanese legal system. For all militants of democracy and peace, this article should be a viaticum for an Africa of peace, justice and solidarity. Furthermore, it is an appropriate direction for achieving the Millennium Development Goals.

 

Renouncing forever war as a sovereign right of the nation and the threat or use of forces as mean of settling international disputes, the founding fathers of the Japanese constitution heard recognize not only for the Japanese people, but to all peoples of the world "the right to live in peace, free from fear …” (Préambule). Far from being just a simple principle statement, Article 9 prescribes that « In order to accomplish the aim of the preceding paragraph, land, sea, and air forces, as well as other war potential, will never be maintained”. It added that the right of belligerency of the state will not be recognized.

 

In doing so, the Constitution of Japan has gone further than the Kellogg-Briand Pact signed in Paris in 1928 which is the first treaty renouncing war as an instrument of national policy for the solution of international controversies. In the same vein, Article 9 goes well beyond Article 2 paragraph 4 of the United Nations Charter as this international provision admit several exceptions to its general ban while Article 9 does no admit any derogation.

 

Drawing experiences in its history, the Japanese people want to preserve the present and future generations of horror of war with its attendant misery for innocent people.

 

Article 9 is drafted in very general terms that it does not forbid clearly the settling of a self defense force. In this perspective, it reinsure those who are fearing about Japan without an army especially in a context of war against terrorism. The flexible drafting of Article 9 explains, according to our opinion, the strength of this provision. A constitution, said Bonaparte, should be "short and obscure", so that it allows positive interpretation that might reconcile or bring together different positions. Thus, Japan has a Self Defense Force that is not legally a classic army, but it brings comfort to those who are hostile to Article 9, without disturbing the militants of the peaceful constitution.

 

For the foreign observer that I am, the absence of armed forces has not prevented Japan from being a great power very listened to and respected in the community of developed nations. Likewise, Costa Rica, which has followed the footsteps of Japan in adopting a peaceful constitution, was never threatened in its existence. Rather, it is even a model of political and economic development for the Central American States. By creating a ministry of disarmament, New Zealand embarked on the path mapped out by Japan and followed by Costa Rica.

 

These examples comfort our view that army does not determine the existence of a State and, accordingly, the principles of Article 9 are far from being utopian or idealistic. They can precisely inspire African states who are dealing with scarcity of economic and financial resources necessary for development. Moreover, the experience of the state without an army was experimented in Africa by Gambia from its accession to international sovereignty in 1965 until mid 1980. A paramilitary force had been set just for police operations.

 

The resources allocated to the army and the unbridled arms race can be recycled to cover more humane and consistent spending with the Millennium Goals for the United Nations Development to reduce poverty by half by 2015. Moreover, armies no longer meet the traditional missions for which they were created. The conventional wars have disappeared from the African field, the army loses its vocation is to defend the territory and independence of the State. It is not for the army to conduct internal wars that break down into mere police operations.

 

In this same perspective, the development of integrated regional organizations tends to curb the threat of war between member states. The integration conventions or treaties contain clauses, which often affect the primary vocation of national armies.

 

The adoption of this pacifist provision by African political regimes will not be an easy task. Mentalities are not yet prepared and the military lobby is still very powerful. The war emerging in the minds of human being, it is at this level that one must act to entrench a culture of peace.

 

The mission of the peace movement is not easy to endorse since it has to develop convincing arguments to counter initiatives revision. A struggle is to be carried out in the direction of public opinion to better disseminate and to increase the legitimacy of the peace movement which is often described by his opponents of surreal, even utopian or unworkable. In our view, Article 9 is far from being surreal, utopian or chimerical for the following reasons:

 

- Article 9 has a constitutional existence, the rulers as the people must draw all its consequences;

- Article 9 is neither abstract nor utopian, it is precisely for this reason that its opponents are waging a campaign to remove the constitutional arrangement;

- Article 9 has lived more than 50 years without disturbing fundamentally political actors why change it now;

- Article 9 disturbs its opponents. It means that it is a good constitutional provision, as the vocation of the constitution is to limit the rulers;

- It should even go further to protect Article 9 against any constitutional revision, as is the case, for example the USA where the constitution prohibits any revision affecting the equal representation in the Senate of the Federated States.

 

The debate on whether to retain or revise Article 9 should not be confined only to experts. It involves public opinion which will ultimately arbitrate the dispute between opponents and supporters of the constitution peacefully. In this respect, peace activists should conduct a dynamic campaign to raise awareness and convince Japanese citizens and the citizens of all the world about the benefits of Article 9 which should be part of the common heritage of mankind.

 

Thank you for your kind attention.